Mercredi 7 janvier, j’ai dépassé mon terme depuis 6 jours. Je ne tiens plus en place ! Il reste 8 jours avant mon déclenchement que je redoute tant. Déclenchement qui doit se passer en milieu hospitalier et je n’aime pas les hôpitaux.
Avant même d’être enceinte, il était clair que je voulais accoucher à la maison. En tant que sage-femme, j’ai eu l’opportunité d’accompagner de nombreux accouchements, tant à la maison qu’à l’hôpital. J’ai assisté à de nombreuses et magnifiques naissances à l’hôpital, mais l’accouchement à la maison me semblait un peu plus magique.
J’avais avant tout le souhait d’un accouchement naturel, sans médicaments et sans péridurale. Le terme étant dépassé, je me suis mis une énorme pression, peut-être même un peu trop, j’étais stressée… non pas à cause de la douleur, mais parce que les choses risquaient de ne pas se dérouler comme je le souhaitais.
Mais ce mercredi-là, après une discussion encourageante avec mes amis et mes collègues sages-femmes, je suis parvenue à lâcher quelque peu prise et je décide de me changer les idées ! La musique à fond et je nettoie ma salle de bains ! Je fais vraiment le ménage, je m’occupe de chaque recoin. Après cela, je me défoule en jouant du violon (excusez-moi les voisins) et je décide aussi de me rendre à pieds à mon cours de yoga.
Le cours de yoga me plaît et j’y rencontre une gentille maman. Toutes les mamans sont bien sûr très gentilles chez Zwanger in Brussel, mais sans qu’elle le sache, cette maman m’a donné tellement de force ! Au moment où j’ai appris ma propre grossesse, j’étais la sage- femme qui a accompagné son accouchement et celui-ci se passait à domicile. Et qu’est-ce qu’elle a bien fait cela, elle rayonnait vraiment d’une force primitive, je l’admirais et j’espérais faire aussi bien qu’elle.
Après le cours de yoga, je suis rentrée chez moi, cela faisait une sacrée balade de 7 km ! Avec de la musique dans les oreilles, et « en grande conversation » avec mon bébé, je lui dis que je suis prête et que je trouve tout cela très excitant.
Après une agréable soirée avec mon compagnon, nous nous couchons tôt.
Le lendemain matin, je me réveille à 7 heures avec des contractions ! Elles sont encore très légères mais elles sont là et elles perdurent, enfin ! Mon compagnon et moi décidons d’aller à l’hôpital pour le monitoring prévu et un contrôle de ma tension artérielle qui était trop élevée ces dernières semaines. Le monitoring était parfait, à l’exception d’une décélération du rythme cardiaque du bébé dans les 5 dernières minutes. J’ai peur mais je peux aussi relativiser car je sens bien mon bébé bouger. La gynécologue me conseille d’avancer mon déclenchement, elle propose le lundi au lieu du mercredi. Je me dis que c’est absurde, si elle peut attendre jusqu’à lundi, c’est que ce n’est pas si urgent, cela pourra donc attendre jusqu’à mercredi. Mais peu m’importe, parce que j’ai des contractions et que je vais probablement accoucher cette nuit, c’est en tous cas ce que je dis à la sage-femme de l’hôpital.
Une fois à la maison, mon compagnon et moi faisons une sieste, des exercices de spinning babies pour bébé et j’écoute mes séances d’hypnose. Mais les contractions ne s’accentuent pas. A 23h, elles s’arrêtent même complètement. Déçus, nous nous mettons au le lit. Vers minuit, je ressens à nouveau une contraction, et quelle contraction ! C’était une bonne contraction ! A chaque contraction, j’étais soulagée ! Elles continuent et se succèdent rapidement, c’est intense… mais je les ai attendues, elles me donnent donc aussi beaucoup de courage ! Mon corps est en train d’accoucher, mon corps peut le faire ! Vers 2 heures, Jeroen appelle ma collègue Elke. Elle arrive vers 2h30. Je suis bien en travail, avec des vagues toutes les 2 minutes. Je secoue et berce mon bassin, debout et assise sur le ballon. J’attrape quelques vagues, à quatre pattes, pendant que Jeroen me masse le dos. J’essaie de respirer le plus calmement possible, comme je l’ai appris lors de mes leçons d’hypnose. À 3h45, mon col est effacé et j’ai 3cm d’ouverture. Je suis déçue, car il y a 3 jours, j’avais déjà 2 cm… Elke me conseille de prendre un bain. Vers 4 heures du matin, je prends un bain.
Elke et Jeroen me laissent tranquille pendant un moment. Pendant ma grossesse, j’avais déjà dit à Jeroen et Elke que cela me ferait probablement du bien d’être seule de temps en temps pendant le travail. J’ai pu me couper complètement du monde qui m’entourait, j’étais complètement dans mon cocon. Je n’avais absolument plus la notion du temps, mais il faisait toujours nuit dehors. Les contractions dans le bain deviennent super intenses et mes ondes positives d’avant disparaissent. Je ne peux pas faire ça, comment font les autres femmes, je ne sais pas le faire, peut-être que je ne suis pas encore prête à devenir maman… Je me suis demandée jusqu’à quel point cela pourrait devenir encore plus douloureux. A ce moment, je comprends parfaitement que certaines femmes souhaitent une péridurale. Mais un trajet en voiture jusqu’à l’hôpital et des aiguilles dans le dos me découragent tout autant, alors je continue à accoucher chez moi.
Entre-temps, tout le monde est venu s’asseoir à côté du bain et m’encourage. Je ressentais parfois une envie de pousser mais je n’osais pas encore l’exprimer. J’avais peur que cela soit un signe que mon bébé était mal positionné et j’ai donc essayé de l’ignorer.
Vers 6 heures Elke me conseille de sortir du bain et de voir à combien de centimètres de dilatation je suis. Elle m’examine, son visage semble sérieux. La pensée que « Ho, rien n’a changé du tout », me traverse l’esprit. Je demande désespérée : « Ce n’est pas bon, n’est-ce pas ?», « Chut, j’examine » dit-elle. Suivi d’un : « Tu as 8cm ». Je réponds quelque chose du genre : « Ok, parce que je le sens pousser ! » Et peu de temps après, je perds les eaux. Après cela, le niveau d’adrénaline dans la pièce monte, Elke prépare tout et Jeroen met en place le bain. Mes collègues Arlind et Eva et la photographe « de naissance » sont appelés. En attendant, j’ai clairement une envie pressante de pousser et donc je le fais un peu de temps en temps. Je supplie : « Bébé sort ».
Entre les contractions, j’entends Jeroen jurer sur le bain d’accouchement. Je crie : « Laisse ça, viens près de moi ». Vers 6h40, je pousse vraiment. J’essaie d’imaginer que la tête à la taille d’une balle de ping-pong. Je pense que cela je peux le faire sortir. « Allez bébé, je suis prête à te rencontrer ! », je m’encourage.
Vers 7 heures, Arlind et le photographe arrivent. Arlind me rassure, je suis contente qu’elle soit là. Un peu plus tard, Eva arrive aussi, mon équipe est complète. La poussée se passe en fait plutôt bien ! J’entends Elke dire à Arlind : « Amai, c’est un premier enfant », elles me rassurent et me disent que la tête est déjà visible ! Beaucoup de cheveux ! Maintenant, je ne peux pas nier que la tête est plus grosse qu’une balle de ping-pong. Ça brûle, j’ai l’impression que j’allais me déchirer. La tête est presque née ! Autant je veux pousser de toutes mes forces, autant j’essaie de le faire en douceur, pour éviter d’avoir une déchirure. La tête naît et à la prochaine contraction le reste du corps arrive.
Quel moment magique, Jeroen éclate en sanglots et je fixe avec incrédulité cette petite personne sur mon ventre. En attendant, nous étions le vendredi 10 janvier et il était 7h20.
Nous avons réussi ! Mon corps a réussi ! Si fiers et si amoureux. Vint ensuite la surprise nous avions une petite fille ! Bienvenue Cécile !
En attendant, j’ai eu l’impression de perdre pas mal de sang et de caillots. J’ai entendu Elke et Arlind discuter de la possibilité de me donner du Syntocinon pour faire contracter mon utérus. Je leur dis : « Oui, donnez-moi une injection ». Je pourrais bien supporter une piqûre dans la jambe. Le placenta est né et les pertes de sang se sont normalisées.
Au bout du compte, j’avais deux petites déchirures, mais qui n’avaient pas besoin d’être suturées.
Quand tous mes soins ont été faits, Cécile a été mise en peau à peau sur son papa, Jeroen. Nous n’avons pas eu besoin de lui demander deux fois. Avant même que ma phrase ne soit terminée, son t-shirt s’était envolé.
Pendant ce temps, j’essayais d’uriner.
Ensuite, nous avons essayé de faire boire Cécile au sein, cela demande un peu de patience mais nous avons finalement réussi !
Quand elle a eu fini, elle a été pesée et mesurée. Presque 4 kilos et 51cm.
Elke et Eva nettoient encore tout et Arlind part faire ses visites à domicile. Quand Elke part elle aussi, c’est comme si rien ne s’était passé dans notre appartement. Le canapé sur lequel j’ai donné naissance est comme avant. Vraiment magique. Eva reste pour surveiller mes pertes de sang et s’occupe de la lessive pendant que nous faisons une sieste à trois.
Quelle expérience !
Donner naissance à un enfant est vraiment la chose la plus folle que j’ai faite. Cela me donne, encore des semaines plus tard, tant de force, tant de confiance en moi. Et une telle confiance dans toutes les femmes.
Une chose est certaine, je ne suis plus la même sage-femme qu’avant.