13h

Nos deux fils vont se coucher pour leur sieste de midi. Selon une habitude bien établie j’en profite pour me mettre au lit également. Celui qui croit que la fatigue de la grossesse se limite aux trois premiers mois, peut me prendre en exemple que cela peut se passer autrement aussi : neuf mois de fatigue.

16h

La maison baigne toujours dans le silence complet. D’habitude ils ne dorment pas aussi longtemps. Moi je suis en tout cas bien réveillée et profite pleinement de la quiétude et du silence à la maison.  Hmmm, j’aimerais reculer au plus tard le moment où ils ne voudront plus faire des siestes.

16h20

Je dois aller à la toilette.  J’ai l’impression que je continue à uriner, que je ne contrôle pas ma vessie. Etrange.  Je le raconte à Bert et sens en même temps qu’une nouvelle vague arrive.  Pas normal.  A moins que ce ne soient mes eaux.  Vérification mais cela ne me paraît pas être le cas : c’est limpide or, je me rappelle que les fois précédentes elles étaient d’une couleur rosatre avec des flocons dedans.  Je me redirige une nouvelle fois vers la toilette mais trop tard, mon slip est tout mouillé.  Double vérification : ce sont donc bel et bien mes eaux.  Et moi qui pensais que mes accouchements débutaient toujours tôt dans la matinée.  Comment je vais maintenant gérer cet accouchement en plein après-midi.

16h30

Bert appelle Lieve. Elle nous conseille de faire appel à quelqu’un pour emmener les enfants ailleurs afin de pouvoir encore profiter d’un peu de temps à deux. Bert appelle donc ma mère.  Je l’entends dire qu’ils pourront être là aux alentours de 17h30, qu’il n’y a de toute façon pas encore des contractions, que nous avons donc encore bien le temps. De mon fauteuil je crie que l’on fera alors appel à quelqu’un d’autre. Qu’elle doit venir tout de suite ou pas du tout.  Elle vient tout de suite.  Les enfants dorment toujours.

16h45

Bert s’active avec quelques morceaux de tissu pour occulter un peu les fenêtres de la  cuisine, jette quelques jouets dans le coin à jouets, allume le feu. Moi toujours dans le fauteuil et j’ai des contractions.  En plus, il fait toujours silencieux. Je me lève doucement pour rassembler quelques affaires pour les enfants et m’autofélicite pour mes préparatifs : tout est déjà prêt, près de la porte d’entrée.  La troisième fois, c’est la bonne.

17h

Maman frappe à la fenêtre.  Bert sort Linus et Wannes de leur lit et les pousse un peu ébahis dans les bras de leur mamy.  Affaires emportées, au-revoir.  Je reste couchée dans le fauteuil et ai entretemps de véritables contractions. 

17h05

Bert appelle Lieve.  Est-ce qu’elle veut déjà venir jeter un coup d’œil.  Elle veut bien.

17h10

Bert prépare encore l’une ou l’autre affaire, m’apporte un peu d’eau et s’installe à mes côtés. Je me demande pourquoi Lieve tarde à arriver. Cela me paraît une éternité.  Et mes contractions, doivent-elles vraiment se succéder à une telle allure ?  Est-ce vraiment nécessaire que cela fait aussi mal ?  Bert me demande si je ne veux pas aller au bain, à l’étage. Vouloir certes, mais je me pose la question si j’arrive encore à monter.  Et surtout si je vais encore pouvoir redescendre.  Une fois que je serais dans la baignoire, je ne pourrais en ressortir avant d’avoir notre bébé.  Et je ne veux aucunement accoucher dans la baignoire.  Peut-être surtout : je ne veux pas devoir poser un pied devant l’autre, je ne veux pas monter l’escalier, laisse moi donc tranquillement ici.

17h30

Lieve est arrivée. J’ai peur, tout va tellement vite. Donc : des larmes, raconter, se laisser aller.  Je me réalise qu’aujourd’hui nous allons faire connaissance avec notre troisième enfant. Et subitement j’accepte.  Les contractions ne diminuent pas pour autant et n’en sont pas moins douloureuses.

A partir de ce moment je perds toute notion de temps.  Tout va surtout vite, très vite.  Les contractions s’intensifient encore, en fait cela ressemble plus à une contraction continue qu’à plusieurs contractions.  Je voudrais changer de position.  A quatre pattes, me suspendre au fauteuil, au tabouret du bar, au fauteuil, à travers les genoux de Bert, au tabouret de bar.  Du coin de l’œil j’aperçois un petit fauteuil qui fume, il est trop près du feu.  Je m’en fous.  Bert ne s’en fout pas et il prévient la stagiaire-sage-femme.  Sur le tabouret de bar, à côté du tabouret de bar.  Entretemps Ann est arrivée également. Sur le tabouret de bar.  Ça va beaucoup trop vite. Est-ce que ce sont déjà des contractions pour pousser ?  Oui.  Est-ce que notre enfant va déjà naître maintenant ? Si tu le veux.  OK.  Et le voilà.  Je sens la tête, je sens ses épaules, est-ce que cela ne doit pas se passer par étapes ? Je sens son corps, retire mes mains et laisse notre enfant venir au monde.

18h40

Il est là.  Il s’appelle Florian et il est magnnifique.

Complément au récit, de Lieve:

Une troisième naissance dans une famille, une troisième naissance à laquelle j’assiste.  Tout un chemin déjà parcouru avec cette belle famille chaleureuse.  Dès que j’y entre, je me sens à la maison.  Je ne dois plus me présenter, nous nous connaissons.  Cette naissance va droit au but, l’enfant sait ce qu’il veut.  Même si la maman se remet parfois en question, l’enfant sait déjà.  Les parents travaillent en commun, ensembles ils ont conçu l’enfant dans l’amour, ensembles ils l’ont mis au monde entouré d’amour.  Tellement beau, tellement vrai, un réel privilège d’avoir pu être présente.

Bienvenu à Florian frère de Linus et de Wannes, aussi unique que tes frères, mais malgré tout ils sont trois dans la même filière.

Un gros calin à Soetkin et à Bert pour votre tendresse, votre ouverture l’un à l’autre et envers vos enfants.  Le chemin à parcourir est identique à celui d’une naissance, parfois lourd et pénible, mais ensembles vous prenez ce chemin, entourés par beaucoup d’autres.

Lieve